Pour un conseil national permanent et autonome (Débat sur les statuts de Québec solidaire au congrès de mai 2016)
Un des problèmes identifiés dans la révision des statuts de Québec
solidaire qui se conclura au congrès de la fin mai est l’incapacité du conseil
national (CN) à jouer pleinement son rôle d’instance intermédiaire dans le
fonctionnement du parti. En théorie (voir ses mandats à l’article 11.1), cette
instance doit superviser d’assez près les activités du comité de coordination
national, de l’aile parlementaire, de la commission politique et de tous les
divers groupes de travail nationaux du parti. En fait, elle n’y arrive pas en
raison de ses rencontres trop peu fréquentes (une fois par année, au plus) et mal
situées dans le calendrier : en novembre, quand il est trop tard pour
influer sur les priorités de travail politique et trop tôt pour prendre des
décisions budgétaires et administratives.
En conséquence, le comité de coordination national (CCN), composé d’une
douzaine de personnes élues en congrès, se trouve à prendre des décisions qui
devraient en principe être prises par une instance plus large et représentative.
Cette centralisation du pouvoir au CCN est sans doute une des sources de la
frustration ou des interrogations exprimées parfois par des militantes et
militants de QS à propos du mystérieux « national ». Si le CN était
capable de jouer le rôle qu’on lui avait assigné à la fondation, le
« national », ce serait cette instance intermédiaire composée de
délégations de toutes les associations du parti.
Une autre problématique qu’une réforme du CN pourrait adresser est celle
de la communication interne dans le parti. Présentement, l’accès des
différentes associations à l’information sur ce qui se fait au niveau national
est très inégal en raison des réseaux informels dont peuvent bénéficier
certaines personnes impliquées dans les associations. Autrement dit, tout le
monde n’est pas équitablement « dans le coup » en ce qui concerne
l’évolution des débats au CCN, à la commission politique, au comité de
stratégie, etc.
Des propositions pertinentes
Un comité de révision des statuts a envoyé une série de propositions aux
associations au début mars. Certaines de ces propositions concernent le CN et
vont dans la bonne direction. Par exemple, on confirme que le CN doit
superviser le travail de l’aile parlementaire et on y inclue jusqu’à quatre
membres de la députation. On affirme aussi que le CN devrait
« normalement » se réunir deux fois par année. Mais on indique
immédiatement que ce minimum ne s’appliquera pas les années de congrès (il y en
a eu un par année depuis la fondation…). C’est par la pratique que des progrès
pourront se faire sur ce plan.
De plus, le comité recommande d’inclure dans les statuts des normes de
convocation précises pour un CN ordinaire (30 jours) ou extraordinaire (10
jours). Ces détails peuvent paraître anodins, mais en comparaison avec la
pratique développée depuis quelques années de préparer les CN comme de
mini-congrès (avec de longs délais de convocation, l’envoie d’amendements
à l’avance par les associations, un travail de synthèse, etc.), il s’agit d’un
pas important en direction d’un CN véritablement « intermédiaire »
entre le CCN et le congrès. On sous-entend avec ces délais de convocation que
le CN peut être convoqué simplement sur la base d’un ordre du jour et d’une
série de propositions du CCN et que les amendements et nouvelles propositions
des associations pourront être présentées et débattues sur place.
Une pièce manquante au casse-tête
Une modification supplémentaire qui pourrait faire toute une différence
serait de concevoir le CN non pas comme une réunion ponctuelle, avec des
délégations éphémères, mais comme une instance à l’existence permanente, comme les
instances que le CN est chargé de superviser, mais qui se réunit moins souvent.
Entre les réunions, les membres du CN disposeraient d’un forum de discussion
privé leur permettant d’échanger constamment sur ce qui se fait au parti, tant
au niveau national que dans les circonscriptions et les régions. Ce serait le
lieu par excellence de la communication horizontale entre les associations. Au
lieu de devoir toujours passer par « le national » pour faire passer
des idées, ou par des réseaux informels de connaissances, un outil officiel
serait mis en place pour favoriser ces échanges. Le brassage d’idées qui en
découlerait serait précieux pour la préparation des rencontres du CN et
probablement pour celles du CCN également (dont tous les membres sont aussi
membres du CN).
Aussi, le fait de désigner les délégations au CN pour des mandats
prolongés (six mois, un an, deux ans, comme le voudront les associations) rend
ces délégations bien plus solidement redevables aux associations. On s’attendra
à ce que ces personnes fassent rapport aux associations sur les décisions
prises à chaque rencontre du CN et sur le contenu des échanges informels entre
les rencontres. Il sera aussi plus facile d’assurer un suivi des mandats d’une
réunion d’instance nationale à une autre.
L’autre avantage de taille de cette idée est de faciliter grandement
l’auto-convocation du CN. En ce moment, les statuts prévoient qu’un CN doit
être convoqué à la demande du tiers des associations reconnues. C’est beau en
théorie, mais s’il n’y a pas de mécanisme pour permettre aux associations de
communiquer facilement entre elles, cette clause est purement cosmétique. La
constitution du CN comme instance permanente et la mise sur pied de son outil
de communication sont essentielles pour rendre le CN autonome par rapport au
comité de coordination national et donc lui donner tout le pouvoir qui devrait
être le sien dans la structure du parti.
Notre amendement
En terminant, voici l’amendement qui a été adopté par l’assemblée
générale de QS-Hull et qui devrait figurer au cahier synthèse.
Dans
la section 11.3, ajouter le texte suivant :
« Les
personnes déléguées au CN sont considérées comme membres du CN jusqu’à ce que
l’instance qui les délègue décide de modifier la composition de sa délégation.
Le groupe ainsi constitué en permanence devra disposer d’au moins un outil de
communication lui permettant d’échanger entre les rencontres du CN, mais sans
prendre de décisions, sauf s’il s’agit de se convoquer lui-même tel que le
prévoit l’article 11.3.2. »
Dans l’ensemble, il s’agit de concevoir le CN différemment et d’oser
innover dans nos modes de fonctionnement. Un CN permanent et autonome
constituerait un instrument précieux pour la cohésion d’ensemble du parti, pour
la communication efficace entre le centre (CCN, CP, CNF, aile parlementaire…)
et la périphérie (associations locales, régionales, de campus…) ainsi que les
échanges horizontaux entre les associations. Ce mécanisme permettrait de
réduire les tensions, d’apprendre plus rapidement les uns des autres, de rendre
les différents secteurs du parti plus transparents et redevables. Bref, nous
aurions un parti plus démocratique et plus solidement enraciné.
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